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Le divorce en Belgique : formes, procédures et effets

Notions Le mariage peut être dissout de trois manières différentes : Le divorce en Belgique, contrairement à l’annulation qui requiert la nullité d’une des conditions légales du mariage, est la seule manière de dissoudre un mariage, qui ne fait pas défaut, entre vivants. Il existe deux formes de divorce : le divorce pour cause de désunion irrémédiable et le divorce par consentement mutuel. Le divorce pour cause de désunion irrémédiable 1. Cause de divorce en Belgique Pour commencer, en Belgique, toutes les causes de divorces sont réunies sous les vocable « désunion irrémédiable ». La désunion est irrémédiable « lorsqu’elle rend raisonnablement impossible la poursuite de la vie commune et la reprise de celle-ci entre eux. » (art. 229 c.civ.). Cette désunion irrémédiable doit être prouvée et elle peut l’être de 3 manières correspondant aux trois paragraphes de l’article 229. 1.1. La preuve par toutes voies de droit (art. 229, § 1er c.civ.) Un époux seul peut invoquer devant le juge un fait prouvant la désunion irrémédiable des époux. Il pourra s’agir d’un manquement grave aux devoirs du mariage qu’il reproche à l’autre époux, afin de prouver la désunion irrémédiable. Outre la preuve de faits transgressant les devoirs matrimoniaux, le juge pourra prononcer la désunion irrémédiable pour des faits qui ne sont pas fautifs mais suffisamment graves, comme par exemple un grave problème psychiatrique. Le fait reproché peut être rapporté par toutes voies de droit, le juge en appréciera la gravité. 1.2. La demande conjointe (art. 229, § 2 c.civ.) Les époux peuvent demander conjointement le divorce pour cause de désunion irrémédiable s’ils sont en accord sur l’idée de divorcer mais pas sur les modalités de divorce, les empêchant ainsi de divorcer valablement par consentement mutuel. Pour être autorisés à divorcer pour cause de désunion irrémédiable, la preuve de délais de séparation leur est imposée, ces délais agissant comme une présomption irréfragable de désunion irrémédiable. En effet, la loi suppose qu’après un certain temps passé séparés l’un de l’autre, les époux sont désunis irrémédiablement. Ces délais sont (art. 1255, § 1er C. jud.) : Hypothèse n° 1 : Des époux demandent conjointement le divorce sur base du § 2 de l’article 229. Ils sont séparés de fait depuis le 1er octobre 2023 et introduisent leur demande le 5 avril 2024 : le délai de 6 mois est dépassé, il pourra prononcer immédiatement le divorce. Hypothèse n° 2 : Des époux demandent conjointement le divorce sur base du § 2 de l’article 229. Ils sont séparés de fait depuis le 1er octobre 2023 et introduisent leur demande le 1er novembre 2023. Étant donné que le délai de 6 mois de séparation de fait n’est pas atteint, le juge fixera une deuxième audience 3 mois après la première étant donné que le délai de 6 mois ne sera pas atteint entre-temps. Trois mois après la première demande (le 1er février 2024), il prononcera le divorce. Hypothèse n° 3 : Des époux demandent conjointement le divorce sur base du § 2 de l’article 229. Ils sont séparés de fait depuis le 1er octobre 2023 et introduisent leur demande le 1er février 2024. Étant donné que le délai de 6 mois n’est pas atteint, le juge fixera une deuxième audience à l’échéance des 6 mois de séparation car ce jour arrivera dans les 3 mois suivant la première audience. La deuxième audience aura donc lieu le 1er avril 2024. La preuve de la séparation peut se faire par constat de domicile séparé, c’est-à-dire que chacun va ramener la preuve de son lieu de domicile permettant de conclure en une séparation. 1.3. La séparation de plus d’un an Enfin, si un époux désire divorcer sans le consentement de l’autre et sans qu’il puisse invoquer le § 1er de l’article 229, le simple écoulement d’un délai d’un an suffit à présumer la désunion irrémédiable. Le délai se calcule de cette manière (art. 1255, § 2 C. jud.) : 2. Effets du divorce en Belgique pour cause de désunion irrémédiable 2.1. Le moment où le divorce sort ses effets (art. 1278 C. jud.) Entre époux, il faut distinguer selon les effets personnels des effets patrimoniaux du divorce : À l’égard des tiers, les effets du divorce se produisent le jour où mention du divorce est faite à l’état civil. 2.2. Pension alimentaire après divorce (art. 301) Nous renvoyons le lecteur à l’article rédigé sur la pension alimentaire pour de plus amples informations. De la même manière, c’est à ce moment que se pose la question d’une éventuelle indemnité d’occupation telle que nous en avons déjà parlé. Le divorce par consentement mutuel 1. Les conventions préalables à divorce Tout d’abord, les époux qui sont en tout point d’accord sur les effets consécutifs à leur divorce pourront divorcer par consentement mutuel . Étant donné que le divorce se base sur la volonté exclusive des époux, le divorce ne pourra pas avoir lieu tant qu’il n’y aura pas de consensus sur l’entièreté des conventions. Pour s’assurer d’un tel consensus, le Code judiciaire impose certains points que les parties doivent impérativement mettre au clair sous la forme d’une « check-list » . 1.1. Le règlement transactionnel (art. 1287 C. jud.) Le règlement transactionnel est la partie des conventions préalables qui règle le sort des patrimoines des époux. Il doit comprendre le choix des époux quant à leurs droits successoraux en cas de décès de l’un d’eux avant la fin de la procédure. Ce règlement pourra faire l’objet de modification en cours de procédure si les époux rapportent la preuve de circonstances nouvelles et imprévisibles (art. 1293 C. jud.). Cependant, dès que le divorce est prononcé, la transaction ne pourra plus être modifiée en vertu du principe de la convention-loi. 1.2. Les conventions personnelles (art. 1288 C. jud.) La loi impose que les époux s’accordent dans leurs conventions préalables sur différents points d’ordre purement personnel. Tout d’abord, ils doivent préciser les résidences respectives de chacun des époux. Cependant, rien ne les oblige à habiter séparément, la loi demande uniquement de préciser leur lieu d’habitation . Ensuite, les époux doivent se mettre d’accord sur une

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La règle infans conceptus et le point de départ de la personnalité juridique

Notions concernant la règle infans conceptus Le règle infans conceptus est la formule abrégée de l’adage latin « infans conceptus pro nato habetur quoties de commodis ejus agitur » signifiant « l’enfant conçu sera considéré comme né chaque fois qu’il pourra en tirer avantage ». Exemple classique:   Un père décède avant la naissance de son enfant. À certaines conditions, l’enfant pourra hériter de son père, alors même qu’il n’était pas encore né, mais simplement conçu. Il s’agit de l’exception au principe selon lequel la personnalité juridique s’acquiert par la naissance. Pour bien appréhender ce concept, il faut d’abord définir celui de la personnalité juridique, ainsi que le principe de simultanéité auquel la règle infans conceptus fait exception. La personnalité juridique La personnalité juridique est l’aptitude pour une personne à être titulaire de droits subjectifs civils, c’est-à-dire de droits individuels par opposition au droit objectif. Celle-ci peut également prendre l’appellation de capacité de jouissance.  Exemple de droit subjectif civil : un droit de créance, le liberté d’expression, etc. À quoi sert cette notion de capacité de jouissance ? À différencier les humains des choses, au sens juridique du terme. Exemple: Un mineur non-émancipé dispose de la capacité de jouissance parce qu’il est titulaire de droits subjectifs civils. Il peut parfaitement avoir un droit de propriété sur un immeuble, par exemple. Il faut bien distinguer la capacité de jouissance de la capacité d’exercice. Cette dernière est d’une plus grande intensité que la capacité de jouissance car elle permet, en plus d’en être titulaire, d’exercer ses droits subjectifs civils.  Exemple: L’enfant mineur non-émancipé, bien qu’il puisse être titulaire de droits subjectifs civils, ne dispose pas de la capacité d’exercice car il n’est pas en mesure de poser seul des actes concernant ces droits. Pour reprendre notre exemple, l’enfant titulaire d’un droit de propriété n’est donc pas autorisé à décider seul de la vente (lien hypertexte vers l’article sur la vente) de son immeuble. L’incapacité d’exercice touche deux situations, l’une où l’incapacité est la règle, l’autre l’exception.  La première est la minorité. La minorité entraîne, par principe, une incapacité d’exercice. Elle a pour vocation de disparaître à la majorité de la personne, de la même manière qu’elle est apparue, automatiquement. La seconde forme d’incapacité d’exercice est celle qui frappe les personnes majeures vulnérables. Il s’agit de personnes qui à cause de leur état de santé (en général d’une dégénérescence ou déficience de leurs capacités intellectuelles) ne peuvent plus assurer la gestion de leurs intérêts patrimoniaux et/ou personnels. Point de départ de la personnalité juridique Le principe : la simultanéité avec la naissance La règle est simple : la personnalité juridique s’acquiert par le simple fait de la naissance. Il s’agit d’un événement instantané. Mais nous allons voir que ça n’a pas été si évident. L’acquisition de la personnalité juridique suppose deux conditions : (a) la naissance d’un enfant (b) vivant et viable. La naissance La naissance marque le départ de la personnalité juridique. Cependant, la naissance, au sens biologique du terme, est un processus qui n’est pas instantané comme le droit veut nous le faire croire. Bien au contraire, la naissance est un étape qui dure en général plusieurs heures.  Il a donc fallu choisir un moment bien précis durant le processus d’accouchement qui servirait de point de départ à la personnalité juridique. Le critère civil de la naissance est l’autonomie physiologique de l’enfant par rapport à sa mère. La représentation de ce critère se fait symboliquement par la section du cordon ombilical. Dès cet instant, il y a acte de la naissance de l’enfant sur le plan juridique.  Parenthèse : En droit pénal le moment qui marque le départ de la personnalité juridique est le moment où le travail de l’accouchement commence. Avant cela, le fœtus ne bénéficie pas de la protection de la Loi pénale. La naissance a donc une acception différente que l’on se place sous l’empire du droit civil ou du droit pénal. D’un enfant vivant et viable En plus de naître, l’enfant doit être vivant (et viable) pour disposer de la personnalité juridique. La détermination de la vie à la naissance dépend d’une série de facteurs scientifiques qui convergent ou non vers cette constatation.  Quant à la viabilité du nouveau-né, on l’estime viable s’il est possible qu’il continue de vivre après sa naissance. Il s’agit d’une notion ô combien plus floue et qui évolue au gré des avancées scientifiques. Il est possible qu’un enfant qui naît vivant aujourd’hui, mais considéré comme non viable pourra très bien être jugé viable dans cinquante ans.  En réalité, la doctrine retient principalement le critère de la vie à la naissance, davantage que celui concernant la viabilité, pour accorder la personnalité juridique à un nouveau-né. De manière générale, on ne prendra donc pas ce critère en compte.  Cependant, certaines dispositions particulières du Code civil précisent la nécessité de la viabilité pour produire des effets. L’on pense notamment à l’article 331bis de l’ancien Code civil pour toutes les actions concernant la filiation. Mais également à l’article 4.4 et 4.137 du Code civil en ce qui concerne les successions et donations. Dans ces cas précis, il faudra nécessairement l’avis d’un expert qui déterminera si l’enfant était viable lors de sa naissance. L’enfant né sans vie L’enfant né sans vie est celui qui décède à la naissance ou dans les instants juste après celle-ci. De cette manière, la personne chargée de la déclaration de naissance n’a pas pu le faire. Il peut ainsi s’agir d’un enfant né vivant mais si peu viable que l’on sait qu’il ne vivra que quelques instants. Étant donné l’absence de vie de l’enfant, on ne remplit pas les conditions de l’octroi de la personnalité juridique. Par conséquent, il ne fera pas l’objet d’un acte de naissance ni d’aucun lien de filiation juridique. Cependant, le Législateur a instauré,  au sein des articles 58 et 59 de l’ancien Code civil, l’acte d’enfant sans vie. Il s’agit d’un acte symbolique et humain permettant d’individualiser l’enfant et de ne pas le considérer comme une chose, au sens juridique du terme, sous prétexte qu’il n’a pas la personnalité juridique. Si la mère

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La pension alimentaire après divorce

Définition et notions de la pension alimentaire Définition et exemple La pension alimentaire est la somme versée périodiquement par l’un des ex-époux à l’autre après le divorce. Le débiteur de la pension alimentaire est naturellement celui ayant une situation économique plus favorable que l’autre. Exemple classique : Au cours du mariage, Monsieur B décide de passer d’un temps plein à un temps partiel afin de s’occuper du foyer et des enfants. Il ne gagne donc que 800 euros par mois. Survient alors le divorce avec Madame A. Cette dernière perçoit un salaire mensuel de 3.000 euros.  En cours d’instance, le juge octroie une pension alimentaire d’un montant de 300 euros par mois à Monsieur B. La pension alimentaire après divorce est à distinguer de la contribution alimentaire. La contribution alimentaire est la somme d’argent qu’un parent verse à l’autre parent pour l’éducation, l’entretien et l’hébergement de leur enfant commun. Il s’agit de deux obligations alimentaires bien distinctes. Raison d’être de la pension alimentaire Auparavant, le droit à une pension alimentaire constituait une forme d’indemnité. Cette indemnité se fondait par ailleurs, sur la responsabilité civile. En effet, avant 2007, le divorce était étroitement lié à l’idée de faute. Si les époux divorçaient, c’était à cause de la faute de l’un des deux. De ce fait, celui qui avait causé la dissolution du mariage (et à condition qu’il soit l’époux économiquement fort) devait une pension à l’autre. Depuis 2007, le concept de culpabilité a été totalement écarté du droit au divorce. D’ailleurs, le divorce pour faute n’existe plus. Le Législateur a cependant décidé de conserver le régime de la pension alimentaire après divorce. Non pas dans un objectif indemnitaire, mais comme un devoir de solidarité familiale. La pension alimentaire après divorce prend donc le relais du devoir de secours qui lient les époux durant le mariage.  L’article 301 de l’ancien Code civil Dans le cas du divorce par consentement mutuel, les époux peuvent prévoir une telle pension dans leurs conventions préalables. Ils décident alors entièrement et conjointement des modalités de cette pension au sein d’un contrat. L’article 301 de l’ancien Code civil régit plus précisément la pension alimentaire après divorce pour cause de désunion irrémédiable.  Il commence par encourager les parties à s’accorder à l’amiable sur la question d’une pension. En effet, même si les parties divorcent pour cause de désunion irrémédiable, la Loi privilégiera toujours les accords entre eux. L’article 301 précise que cet accord peut avoir lieu à tout moment. Il peut donc parfaitement avoir lieu après qu’une décision judiciaire ait été prononcée sur le sujet. La seule limite d’un tel accord est la renonciation préventive. Avant le divorce, aucun des deux époux ne peut renoncer par convention à demander une pension (article 301, §9 de l’ancien Code civil). Cependant, une telle convention de renonciation peut avoir lieu si l’autre époux fait une concession. Exemple : Monsieur B concède l’attribution préférentielle de la maison commune à un prix moindre, à condition que Madame A ne réclame pas de pension alimentaire. Si les époux ne s’accordent pas à l’amiable sur la pension, c’est le juge familial qui peut en fixer une ainsi que ses modalités. Les règles qui suivent s’appliquent donc en dehors de tout cadre amiable, mais devant le juge et à la demande du titulaire du droit à pension. Titulaire du droit à la pension Principe L’article 301 de l’ancien Code civil fait appel à plusieurs reprises à la notion d’état de besoin. Mais cette notion revêt des acceptions différentes selon les paragraphes. Le paragraphe 2 prévoit que le juge peut « accorder, à la demande de l’époux dans le besoin, une pension alimentaire à charge de l’autre époux. » Il s’agit tout d’abord de vérifier que l’un des deux époux dispose du droit de demander une pension.  L’état de besoin vise ici le fait d’avoir une situation économique plus faible que son époux : c’est tout. Attention donc, l’état de besoin visé par ce paragraphe ne concerne que la titularité du droit et non pas le critère permettant de le mettre en œuvre. Cela ne garantit pas qu’une pension soit effectivement octroyée au titulaire de ce droit. Exemple n°1 :  Madame A et Monsieur B sont en instance de divorce. Madame A perçoit un salaire de 3.500 euros par moi, alors que celui de Monsieur B ne dépasse pas 1.500 euros. Monsieur B se trouve dans un état de besoin par rapport à Madame A. Monsieur B est donc titulaire du droit de demander une pension à charge de Madame A. Exemple n°2 : Madame A et Madame B sont en instance de divorce. Madame B perçoit un salaire de 3.500 euros et Madame A un salaire 3.000 euros. Malgré leur situation similaire, Madame A est dans un état de besoin au sens du 2èmeparagraphe de l’article 301 de l’ancien Code civil puisqu’elle est dans une situation économique plus faible que son épouse. Elle est donc titulaire du droit de demander une pension, mais n’est absolument pas assurée qu’elle lui soit octroyée.  Déchéance du droit de demander une pension Il existe trois situations dans lesquelles l’époux en état de besoin ne pourra pas demander une pension après divorce : 1. L’époux ayant commis une faute grave Si l’époux titulaire du droit de demander une pension a commis une faute grave qui a rendu impossible la poursuite de la vie commune, le juge peut refuser de la lui octroyer.  Cela suppose donc trois conditions : une faute grave, un lien de causalité entre la faute grave et la fin du mariage, ainsi que l’appréciation par le juge. Exemples de fautes graves : l’adultère, l’alcoolisme, etc. La charge de la preuve repose sur le débiteur de la pension (le débirentier). C’est donc à celui qui s’oppose à la fixation d’une pension de prouver la faute grave. La preuve pourra être ramenée par toute voie de droit. Exemple de preuve : le constat d’adultère. En plus de prouver la faute grave, il devra prouver le lien de causalité entre la faute et l’impossibilité de poursuite de la vie commune. Par exemple, si l’époux demandeur d’une pension tombe dans l’alcoolisme mais après que

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